• Historiettes.

    Voici quelques petites histoires. Certaines vraies ou presque, d’autres inventées mais si peu. Je vous les livre aujourd’hui à titre de préparatif : je m’en servirai d’ici peu pour vous parler de choses diverses.

    La salle de conf’ :

    Riri et Fifi sont deux personnes qui se connaissent. Un peu. Disons, par exemple, qu’ils sont tous deux employés dans la même entreprise mais pas dans le même service. Ils se sont déjà croisés devant la machine à café, mais guère plus. Ce jour-là, Fifi est assis, seul, dans la salle de réunion, il jette un dernier coup d’œil au rapport qu’il doit présenter tout à l’heure. Soudain, la porte s’ouvre et Riri entre. Tous deux sursautent : ni l’un ni l’autre ne s’attendait à cette rencontre. Et là, malgré lui, Riri se sent obligé de dire, ­à voix haute ou presque : « Je passais pour aller à la photocopieuse ». Ce dont se fout royalement Fifi d’ailleurs, mais il semble concerné. D’ailleurs, plus rarement, il arrive que ce soit lui qui prenne la parole : « Tiens ! Bonjour … » et ce même s’il a déjà salué Riri un quart d’heure auparavant.

    Que s’est-il passé ?

    De manière inattendue, Riri et Fifi se sont mis à partager un espace trop étroit. Enfin trop étroit, relativement : en fait, dans la salle, dans une demi-heure, ils seront vingt. Mais là, Fifi occupait tout l’espace et Riri pensait entrer dans une salle vide. Automatiquement se met en œuvre un rituel de rencontre. Ce n’est pas là un phénomène étrange : la plupart des animaux font de même. Deux chiens qui se croisent par mégarde, vont marquer un temps d’arrêt puis soit se renifler, soit s’aboyer dessus mutuellement. Ce qui m’intéresse ici, c’est la réaction de Riri. Celle – je le répète plus rare – de Fifi est du même ordre que celle des chiens : un rituel de salutation, mais celle de Riri : il se met à raconter ce qu’il fait et pourquoi et comment et où et … il le fait. Car souvent sa phrase, avant d’avorter parfois, sera : «  Je passais par ici pour aller à la photocopieuse : Loulou m’a demandé une copie de mon rapport sur … ».

    Raconter. Pour « excuser » son intrusion, Riri se doit de raconter son histoire.

    Le sale gosse :

    Ce soir-là, en rentrant du boulot, Riri a manqué d’avoir un accident de voiture. Oh rien de grave, il a freiné à temps, mais n’empêche il a bien failli le renverser ce jeune nigaud avec son ballon. Ouf !

    Arrivé chez lui, que fait-il ? Il raconte à Mme Riri sa mésaventure. Et avec force détails. Et sans doute deux ou trois fois. Mais ce n’est pas tout : pendant le repas, la grande fille et le fiston y auront droit eux aussi, plus tard, il téléphone à sa mère comme ça, comme souvent le soir avant le film, et que fait-il ? il re-raconte. Et le lendemain matin, au bureau, devinez …

    Raconter. Pour « exorciser » son aventure, Riri a besoin de la raconter. Plusieurs fois. Et souvent, de récit en récit, il la complètera de détails.

    La laisse de Médor :

    Médor est un chien bien élevé. Il sait que faire pipi dans le salon c’est « pas bien ». Donc, quand l’envie lui en prend et devient exigeante, il demande à sortir. Pour cela il a tout un manège : il va gratter à la porte, non pas celle qui donne dehors, mais celle du placard qui contient sa laisse. Et, comme il a lui-même bien élevé ses maîtres, la plupart du temps l’un d’entre eux comprend et le sort. Ouf !

    Parfois, les maîtres sont feignants c’est bien connu, le seul résultat est que la porte du jardin est ouverte et que Médor a le droit alors d’y sortir seul. Pas bien grave, il a obtenu satisfaction.

    Rah lovely ![1 ] :

    Sarah est une jeune femelle babouin hamadryas. Dans son groupe, seul le mâle dominant a le droit de copuler. Avec elle entre autres. Oui mais, le petit jeune là est bien tentant, et tenté ça se voit. Que fait Sarah ? Elle va se cacher derrière cet amas de cailloux, s’y laisse rejoindre par qui vous savez et aïe donc mes enfants réjouissons-nous !

    Le grand mâle n’a rien vu, donc pas de conséquences à redouter ni pour elle ni pour le copain. Le pire, c’est qu’il n’est pas rare qu’en réalité le mâle dominant ait parfaitement compris la manœuvre ! Mais bon, faut savoir être tolérant parfois si on veut garder le pouvoir, et puis c’est fatigant de se battre tout le temps.

    Où est le chocolat ?[2]

    On raconte ou on joue avec des marionnettes l’histoire suivante devant un enfant :

    Loulou et Maman sont dans la cuisine, ils rangent le chocolat dans le réfrigérateur. Loulou sort pour jouer dans le jardin. Pendant ce temps, Maman prépare un gâteau. Elle prend le chocolat dans le réfrigérateur, en utilise une partie et range le reste du chocolat dans le placard. Plus tard, Loulou revient, il a faim et veut manger du chocolat. Où Loulou va-t-il chercher le chocolat ?

    Si l’enfant à qui l’on présente cela, a moins de 3 ou 4 ans, il va répondre « Dans le placard », lui sait que c’est là que se trouve le chocolat. Ce n’est que plus âgé que l’enfant sera capable de savoir que Loulou ne sait pas vraiment où est le chocolat.

    La baballe :

    Médor joue à la baballe. Le jeu est simple, son maître lui lance une balle de tennis et Médor se précipite pour attraper à pleine gueule la dite balle. Il la saisit et revient vers son maître tout en la mordillant. Le jeu peut s’arrêter là (à sa déception) et Médor va rester là à feindre de dévorer sa proie, mais parfois, le maître lance une seconde baballe. Et là Médor, sans lâcher la première, se précipite à la poursuite de l’autre. Mais dilemme : laquelle prendre ? Médor n’a qu’une gueule !

    Il existe plusieurs issues à la situation. Souvent Médor va tenter de garder les deux balles, l’une entre ses pattes, l’autre en la mordillant. Parfois il en laisse tomber une (souvent la première) plus ou moins dans l’attente que le maître s’en saisisse et que le jeu recommence. Mais je n’ai jamais vu Médor rapporter une des balles pour garder l’autre.



    [1] Ce qui suit est une paraphrase d’une observation faite par l’éthologue Hans Kummer.          [retour au texte]

    [2] A nouveau paraphrase d’une expérience standard en psychologie cognitive, dite de la « fausse croyance ».          [retour au texte]


  • Commentaires

    1
    Mardi 29 Janvier 2013 à 22:29

    Je n'ai pas beaucoup de temps ce soir (j'ai bossé sur mon blog !), mais si tu causes de comportement animal (y compris chez l'homme), nous allons nous revoir !
    Bonne soirée.

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    2
    Mercredi 30 Janvier 2013 à 15:23

    Je cause de comportement animal comme précurseur des comportements humains.

    Ceci étant, j'ai un immense retard sur mon programme d'articles sur le sujet : mélange de flemme et d'indispositions diverses.

    J'espère que ça va revenir.

     

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