• Il n'y a pas de bonnes guerres.

    Mais il y a de mauvaises paix.

    Il n’y a pas de bonnes guerres pour des tas de raisons, mais je n’en donnerai, ici, que deux.

    Il n’y a pas de bonnes guerres parce que toute guerre tue, éviscère, mutile, détruit, brise la parenté, annihile l’amitié, rend orphelin, extermine l’enfant, pire : le rend autre, vide de sens la vie de mon frère humain.
    Et si je dis mon frère, j’édulcore. Je veux dire moi. Moi, en tant que l’autre est moi : mon frère syrien, mon frère libanais, mon frère irakien, mon frère GI, mon frère malien, mon frère quelconque : tout homme m’est frère. Et je l’aime.
    Oh, comme individu, je peux le trouver détestable ou sympathique, mais même détestable je l’aime. Point.
    C’est ma première raison.

    Il n’y a pas de bonnes guerres, comme il n’y a pas de bonnes révolutions, pour une raison nettement plus triviale, voire obscène. Toute guerre est déclenchée en vue d’un ou plusieurs objectifs, le plus souvent enthousiasmants (au moins pour leurs déclencheurs).
    Mais ces objectifs ne sont jamais atteints, ni par le vainqueur, ni par le vaincu, en admettant qu’il y ait l’un ou l’autre.
    Prenons un exemple, pourquoi la guerre de 14-18 ? Pour deux raisons principales : l’extension du domaine démocratique au dépends du domaine autocratique (prétexte plus que raison, d’ailleurs), le maintien du statu quo colonial de mainmise des Britanniques et des Français sur le reste du monde (au détriment de l’Allemagne qui réclamait sa part du gâteau).
    Quel fut le résultat ? L’émergence à l’Est de l’URSS, régime démocratique s’il en fut, perte de la mainmise sur le monde de la France et du Royaume-Uni au profit des USA. (Et même, situation de vassalisation des deux premiers face au troisième).
    Une réussite, quoi.
    Et d’ailleurs, à tous les coups, l’effort de guerre a rendu caducs les « idéaux » initiaux. Les diluants dans une nouvelle réalité, imprévue.

    Aristote disait que « l’Homme est un animal politique », certes, certes, mais ce brave homme que j’admire profondément était ce jour-là victime d’une erreur de perspective. Avant tout, « l’Homme est un animal guerrier », et s’il devient « politique », c’est entre deux guerres : histoire de se reposer, de refaire ses forces et de préparer la guerre suivante.
    Constat qui m’accable mais je ne me sens pas apte à y remédier.

     

    Il n’y a pas de bonnes guerres,
    mais il y a de mauvaises paix.

    À nouveau, s’il y a de mauvaises paix c’est pour de multiples raisons, mais, là encore, je n’en dirai que deux.

    Il y a de mauvaises paix pour une première raison. On dit souvent, et je l’approuve, qu’on (les armées et leurs états-majors) est en retard d’une guerre : en 1914, on tente de refaire 1870, en 1940, on tente de refaire 1918, au Viêt-Nam, on tente de refaire 1945, etc. Avant de réaliser que…
    Mais j’ajoute qu’on (les politiques, cette fois) est toujours en retard d’une paix.
    L’exemple le plus évident est le Traité de Versailles (1919/20) : on y répéta, à l’envers, les conditions de la fin de la guerre de 1870. Des voix s’élevèrent contre (Keynes par exemple), en vain : l’esprit revanchard était trop fort. Ce fut une catastrophe et, malgré les efforts postérieurs des Américains (plan Dawes par exemple), ce fut une des origines du conflit suivant.
    Mais il y a d’autres exemples.
    Les « leçons » de l’Histoire sont toujours tirées trop tard. À contretemps.

    Il y a de mauvaises paix pour une toute autre raison : on croit toujours que la « dernière » guerre fut la bonne, la décisive. Alors on se repose sur ses lauriers durement acquis et on laisse filer. Mais, je le redis, « l’Homme est un animal guerrier » et il reste toujours, ça ou là, un parti insatisfait, prêt à en découdre dès qu’il le pourra.
    Mais on s’aveugle, on ne voit pas venir et même, quand ça commence, on n’y croit pas. On temporise.
    Oh certes, la diplomatie et la politique ont fait des progrès : une SDN, même sans l’aval du Congrès américain, était un progrès, une ONU, même supervisée par cinq puissances auto-désignées, était un progrès, mais ai-je besoin de vous faire un dessin pour vous en montrer les limites ?
    Alors, on recommence. En pire.

     

    Pourquoi je vous parle de ça ?
    Pour cause de Syrie bien sûr : il aurait fallu agir plus tôt, et maintenant il ne reste que de mauvaises solutions. Agir, ce sera inefficace, ne pas agir, ce sera catastrophique. Trop tard.
    Mais pas que la Syrie, tous les conflits à venir sont en train de frémir sur le feu et on ne baisse pas le gaz.
    Ça va bouillir.

     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 6 Septembre 2013 à 09:07
    Je ne vais pas dire grand chose de neuf : NOUS (pas les politiques : NOUS), on nous prend pour des cons. Nous n'avons jamais (et c'est normal, non ? Puisque nous ne sommes pas des politiques, puisque nous ne servons que de faire valoir à leurs ambitions et ideaux.) Toutes les données.
    C'est â partir des informations qu'on nous distille et que nous interprétons en fonction de notre intellligence, de notre sensibilité, de nos idéaux que nous prenons tel ou tel parti. C'est pour cela je suppose qu'il faut tant de temps pour avoir une analyse correcte d'une situation historique.
    Prétexte ou raison, peu importe : nous sommes (NOUS, pas les politiques), des jouets, et rien de plus.
    Entendre dire ou lire que 120 000 morts, c'est trop, quelle blague ! Et quoi ? 115 000, c'était mieux ? 100 000, c'était tolérable ? 80 000, on n'a pas vu ?
    Armes chimiques ? Pfffffff ... Il se passait quoi, au Vietnam ? Et ailleurs ? Et les viols, meutres, exactions, c'est pas grave ? Je n'ai jamais entendu parler de guerre sans dommages civils.
    On a trouvé un prétexte pour nous débarrasser de Sadam Hussein. Quelle est la raison qui pousse à vouloir dégager Bachar ? La VRAIE. J'en syrien du tout...
    Il n'y a peut-être pas de bonne paix, mais en tout cas, c'est tout de même plus agréable.
    Je retourne au ciné...un peu de rêve dans ces journées si sombres...
    2
    Samedi 7 Septembre 2013 à 12:56

    Bicar (et des poussières si je ne m'abuse, mais c'est juste pour être aussi désagréable que d'habitude !), Bicar disais-je, a bien raison.
    De quelles informations dispose-t'on pour juger de l'opportunité d'intervenir ou pas en Syrie, au Mali ou ailleurs ?
    Si mes sources sont bonnes, en Syrie il n'y a pas que Bachar el-Assad (docteur es-gaz) et des civils tous opposés au régime et tous potentiellement gazables...
    En toute honnèteté, je ne peux pas avoir d'avis. Juste penser que la guerre est atroce, avec ou sans gaz.

    Mais prolongeons le débat... Qui peut imaginer un monde sans violence, sans injustice ?
    Envisageons une paix mondiale, durable... Cette stabilité sert l'économie, la bourse... Les paradis fiscaux, le travail des enfants, le pillage des ressources terrestres... Que du bonheur !
    Pour nous Occidentaux, c'est bien mieux que la guerre, mais qu'en pensent les premiers concernés, enfants intouchables en Inde, Huaoranis en Equateur...
    Je ne peux évidemment pas avoir un avis éclairé !

    Pourvu que le weekend soit beau et que les Bleus se qualifient pour je ne sais plus quelle compétition !

    3
    Dimanche 8 Septembre 2013 à 08:57
    @Loizodemaleur : wè ! Poussières, c'est ça ! Et bientôt tas de cendres plus vite que prévu si tous ces pseudos intellos avancent dans leurs idées "punitives". Mais pour le moment, j'ai le ventre en bouillie. D'ailleurs je pars m approvisionner en Pampers, c'est plus urgent que le sucre.
    4
    Dimanche 8 Septembre 2013 à 10:06

    A Bicar :

    Je ne te pensais pas rendue à ce point-là ! 

    NB : tu es sur le bon site, le maître des lieux connaît les problèmes et certaines solutions pour les gens de vos âges...

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    5
    Dimanche 8 Septembre 2013 à 12:14

    Je suis bien d'accord avec Bicar et Sparfell, et toi.

    Cependant, on ne peut s'empêcher d'avoir une opinion, ou tout du moins un ressenti, issu des valeurs que nous portons et tentons de faire vivre chaque jour - et sur l'idée d'intervenir maintenant en Syrie, ma conclusion (provisoire) diffère un peu de la tienne : agir maintenant, ça va être catastrophique, plus que jamais je "sens" que ce conflit-là risque d'embraser de très larges zones. Ne pas agir est également horrible, évidemment, mais pourrait (noter le conditionnel) contenir l'embrasement ... pour un temps ... j'ai malheureusement bien compris que ça bouillonne .... et que l'ONU est la SDN d'aujourd'hui ... et que les prochains conflits sont en effet issus du dernier (partage du monde en zones d'influence, Israël, maintien du "Sud" dans un état colonisé, explosion d'un vrai mieux-vivre dans le "Nord" et de l'individualisme > saccage culturel et épuisement de ressources ...)

    Nous, là, en Occident, on est tiraillés. La globalisation nous donne chaque jour des "occasions" de nous identifier à des frères et soeurs qui souffrent à des milliers de kilomètres (toujours en vertu de ces valeurs qui nous animent) et on ne peut que s'insurger d'un vain cri de rage devant la télé ou les journaux : "Putain, mais faut arrêter ça!". Et en même temps, on je n'en peux plus de cette idée bizarre que nous serions les gendarmes du monde. On n'y est pas, nous, "là-bas" - et comme nous avons un peu de bouteille, on sait très bien que celui qui a l'air d'avoir tort dans ma télé à 20h a peut-être "raison" là-bas, sur le terrain, et inversement, ou peut-être pas, comment savoir? Mes racines ne sont pas là-bas, je n'ai pas d'histoire là-bas, et fnalement, je ne sais rien de la vie en Syrie sous Bachar El Assad avant le début du conflit.

    Je ne suis pas du genre à voir des complots partout, mais je mettrais ma main au feu passerais mon pouce sur la flamme de mon briquet que quelques "décideurs experts" (pas les politiques) de l'ombre ont fini de calculer depuis un moment les bénéfices d'un bon gros conflit : crise économique envolée, soulagement pour un temps de la pression démographique sur la planète (la seule dont on dispose, hein) ... Il leur reste juste à "choisir le bon conflit", celui qui ne dévastera pas la planète totalement. Primaire, naïf et parano? Peut-être ...
    Mais il est vrai, comme dit Sparfell, que notre temps de paix pue à tous les étages depuis un petit moment. Je préfère me battre chaque jour, comme je peux, contre la pollution, contre des réformes idiotes de l'éducation, pour éveiller des consciences, pour un mieux-vivre "raisonnable" mais joyeux et simple ... plutôt qu'avec un gourdin ou un flingue terrée dans une maison en ruines.

     

    6
    Lundi 9 Septembre 2013 à 10:03
    Bin il est passè où, le vieux ? Il nous fait un blog annxiogéne, je creuse mon bunker et il disparaît ?
    C'est pas sérieux !
    Je vais planter des pEtards dans mon jardin en attendant
    Ca m occupera ....
    7
    Mardi 10 Septembre 2013 à 23:53

    Histoire de me contredire ou plutôt de confirmer que j'ai raison quand je dis qu'il est déjà trop tard voici deux liens à méditer :

    ceci (assez complet) et cela (plus médiocre journalistiquement parlant).

    Bonne soirée.

     

    8
    Mercredi 11 Septembre 2013 à 07:05

    C'est exactement ce dont je parlais en disant plus haut "on sait très bien que celui qui a l'air d'avoir tort dans ma télé à 20h a peut-être "raison" là-bas, sur le terrain, et inversement, ou peut-être pas, comment savoir?" ... les profiteurs brigands de conflits ont toujours existé, qu'il s'agisse de petites bandes de civils ou de marchands d'armes.

    J'ai fait l'effort de lire cela ce matin, je confirme mon idée qu'on ne devrait pas intervenir, il est peut-être trop tard pour "eux" mais peut-être pas pour le reste du monde ... et j'attends avec impatience mon cours de yoga à 10h45 

    9
    Mercredi 11 Septembre 2013 à 09:28

    Comme tout le monde la guerre et la violence me font horreur, oui, il est probablement trop tard pour une solution "diplomatique", nous (les politiques) nous sommes contentés de hausser le sourcil, les mains sur les hanches en faisant les gros yeux : ça a pas marché, ben tiens !
    Ca me rend malade de me dire qu'il n'y a pas d'autres solutions que la guerre ! Ca me fait peur, pour tous les civils qui vont se faire tuer, tous les soldats qui ne comprennent pas qu'il faut tuer des Syriens justement parce El-Assad tue des Syriens et que c'est pas bien !
    A l'heure ou j'écris ses lignes, la Russie propose de prendre le contrôle des armes chimiques et de les détruire, une solution "moins pire" que la guerre, mais il ne sera pas possible de tout contrôler, il restera forcément des "cachettes", et j'avoue ne pas comprendre (peut-être suis-je sotte) pourquoi El-Assad serait d'accord ... Et puis il pourra toujours continue à tirer suir la foule à balle réelle ...

    10
    Mercredi 11 Septembre 2013 à 12:04

    Mais il y avait aussi eu cela.

     

    11
    Mercredi 11 Septembre 2013 à 13:45

    Leoned 10 : C'était dans les commentaires des articles lus ce matin, d'où mon comm.  :)

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