• Rome 5

    (Épisode précédent)

    Vous allez avoir du mal à me croire, mais je connais un endroit où tout le monde sourit. Tout le monde. Tout le temps. Toute la journée. Avouez que dans ce monde débordant de grimaces et de désespération, ça peut surprendre. Certes, il y a peut-être aussi la scène où se produit tel comique à succès, et éventuellement de talent, mais c’est ponctuel ; d’ailleurs les gens y rient plus qu’ils n’y sourient. C’est pas pareil. Là, on sourit, et on le sait, et on en est content. Et on en sort en souriant toujours. Cet endroit c’est la Fontaine de Trevi.

    Vous la connaissez tous, ou croyez que. D’abord à cause de la Dolce Vita de Fellini et de son « Marcello … ! ». Ensuite, c’est bien rare si vous en avez pas entendu causer ici ou là dans tel ou tel docu sur Rome. Oui, ben, vous connaissez pas si vous y êtes pas allé ne serait-ce que deux minutes.

    D’abord, faut vous dire que c’est le genre d’endroit suffisamment bizarre pour que la dite fontaine soit carrément plus grande que la place qui l’encadre. La fontaine est immense et la place réduite. Ensuite, dans la journée, la place en question est pleine, archipleine de monde. Ça grouille. Pas que des touristes, y’a aussi quelques marchands de gadgets à la mode qui essaient péniblement de gagner leurs sous, mais surtout des touristes. Dans le film, y’avait personne qu’eux deux, on voyait pas la perspective. Là si. Écrasant. À peine la place de se faufiler vers l’eau jaillissante. Et on a envie de s’en approcher, de s’asseoir sur la margelle, de goûter l’eau. Et on finit par y arriver, parce que les autres ils vous laissent passer. Sont heureux je vous dis !

    La coutume c’est : on jette trois francs six sous par-dessus son épaule gauche et c’est l’assurance qu’on reviendra à Rome. Disons 50 centimes d’euros. Et tout le monde le fait. Et personne n’est dupe. Tous les soirs, ça fait un pactole pour les œuvres de la municipalité, on va pas se plaindre. Personne n’est dupe, j’ai dit, donc tout le monde rigole en le faisant. D’autant que, comme on y est rarement seul, y’a le grand-père ou la petite-fille qui photographie la chose, alors on sourit pour la photo et puis on échange les rôles. Et c’est pas tout, ceux qu’ont déjà ou qui vont sous peu, regardent et sourient et de vous voir, et d’imaginer que ça a été eux ou que ça va l’être dans une toute petite minute. Ça te fait une de ces collections de sourires au mètre carré, t’as pas idée.

    J’ai jeté des sous, moi aussi. Les deux fois où j’y suis allé. Entre les deux, seuls les gadgets à la mode avaient changé, rien du reste. La deuxième fois, je m’étais dit : « je jetterai pas de sous et je reviendrai quand même à Rome. Na. » Pas pu résister, je me te les ai jetés à nouveau. Donc, c’est sûr je reviendrai.

    En quittant la place, j’ai dit ce que je viens de vous dire à ma sœur : sourires omniprésents. M’a répondu qu’elle connaissait un autre endroit où. Vérone. La casa di Giuletta. Là non plus personne n’est dupe, n’empêche que tout le monde veut se faire photographier devant le balcon et toucher la poitrine de la statue. On est comme ça nous les humains, la fiction est plus importante que la réalité. Tiens, ça me fait un prétexte de plus pour retourner en Italie. Comme si j’en avais besoin. J’avais déjà les Lacs, Venise, Pompéi, etc. tous les lieux où je ne suis pas encore allé et tous les endroits où je suis déjà passé et que je crève d’envie de revoir. Y’aura Vérone en plus, avant c’était juste Shakespeare, maintenant c’est aussi les gens qui y vont.

    Je vous l’ai dit : je repasserai à Rome.


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